La Ville de Nice accuse Michel Ferry : droit de réponse

Dans un article très intéressant paru dans nice-matin le 10 janvier 2018 sous la signature de Yann Delanoë :  « Charançons : la lutte impose l’utilisation de produits chimiques ; la Ville Refuse »,  la Ville de Nice refuse d'appliquer la loi française et accuse ouvertement Michel Ferry de vouloir mettre en danger la santé des niçois parce qu’il demanderait que les traitements chimiques soient effectués en été. Nous reproduisons ci-dessous l’encart qui contient la réponse de la Ville de Nice.

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Michel Ferry répond :

 

Je n’ai jamais demandé que la ville de Nice utilise des pesticides qui fassent prendre des risques aux niçois ou aux touristes ni en juillet, ni en août ni le reste de l’année. 


Je dis tout d’abord  que je trouve absolument dramatique de voir disparaître le fabuleux patrimoine en palmiers des Canaries de la ville de Nice alors que ce patrimoine peut être  parfaitement sauvegardé et doit l’être. Pour cela, il suffit d’appliquer les quelques mesures rappelées lors de la réunion internationale organisée par la FAO à Rome en mars 2017:


-       inspecter régulièrement les palmiers,


-       intervenir dès qu’un palmier est détecté infesté et s’agissant de palmiers patrimoine d’une si grande valeur ne les abattre que s’ils sont trop infestés pour être assainis,


-        traiter les palmiers situés en zone infestée, non seulement pour les protéger mais pour obtenir la régression rapide du charançon rouge. 


Mais, il faut aussi impérativement que ces mesures soient appliquées dans le cadre d’une organisation collective de la lutte qui prenne en compte tous les palmiers des Canaries (de loin la première cible et le premier incubateur du CRP) sans distinction d’appartenance. Faute d’une organisation collective de la lutte, les efforts de particuliers ou de collectivités qui ne se préoccuperaient que des palmiers dont elles ont la responsabilité sont voués à terme à l’échec. Cela a été démontré partout et souligné une nouvelle fois lors de la réunion de Rome.  
La question de la lutte contre le CRP est donc beaucoup plus large que celle du seul choix à faire entre les trois techniques de traitement préventif autorisées en France dans le cadre de l’arrêté de lutte obligatoire contre ce ravageur.


Concernant ces traitements, réduire le débat à un affrontement bio et non bio est par ailleurs bien trop simpliste.
Depuis plusieurs années, de nombreuses villes ont, comme Nice, fait le choix pour le zéro phyto en conformité d’ailleurs avec une politique nationale et même européenne tout à fait fondée. Avec la loi Labbé du 02/06/14 et la loi pour une croissance vert de 17/08/15, ce choix qui est devenu une obligation pour le traitement en espaces verts publics depuis le 1 janvier 2017, s’appliquera également aux particuliers à partir du 1 janvier 2019. Mais, le législateur, bien conscient qu’il n’existe pas toujours d’alternative aux traitements non bio, a prévu la possibilité de recourir à de tels traitements pour lutter contre des espèces qui, comme le CRP, sont classées en organismes de quarantaine en raison des dégâts considérables qu’ils peuvent causer.


Le problème d’alternative ne se pose pas seulement en termes d’efficacité mais aussi d’applicabilité et de coût du traitement. Concernant le traitement bio contre le CRP avec des nématodes, autorisé en France, c’est la Station Phoenix dont j’assure la direction qui a été la première en Europe à démontrer et à publier qu’en respectant un certain nombre de précautions, ce traitement présentait une bonne efficacité. Mais, l’expérience a prouvé d’une part que ce traitement perdait de son efficacité quand la population de CRP dépassait un certain seuil et d’autre part que ces traitements, beaucoup trop coûteux et lourds à mettre en œuvre n’étaient appliqués que de manière très marginale (idem d’ailleurs pour les traitements à base d’imidaclopride). La catastrophe à laquelle nous assistons à Nice depuis quelques années constitue une dramatique démonstration de ce constat.
Or, pour mettre fin avant qu’il ne soit trop tard à l’hécatombe des palmiers patrimoines niçois, il faut faire très vite. C’est une question de mois !


Nous proposons à la ville de Nice d’adopter une stratégie fondée d’une part sur l’organisation collective de la lutte et d’autre part sur l’application de toutes les mesures  prévues dans l’arrêté, ces deux aspects étant indissociables. Pour le traitement préventif obligatoire, nous considérons que l’injection des palmiers avec l’insecticide Revive, technique mise au point par la station Phoenix rattachée à l’INRA, validée par l’ANSES et autorisée par le Ministère de l’agriculture,  constitue l’ultime option réaliste pour stopper l’hécatombe à temps et obtenir rapidement et massivement la régression du CRP. Cet objectif peut et doit être obtenu en un nombre d’années strictement limité pendant lesquelles l’obligation zéro phyto sera mise entre parenthèses comme le prévoit la loi. Le choix pour cette technique n’empêche évidemment pas les propriétaires qui le souhaitent de traiter avec des nématodes ou même de l’imidaclopride, à condition qu’ils respectent strictement les conditions d’application permettant d’assurer une certaine efficacité à ces traitements.


Le traitement par injection du Revive présente des avantages considérables par rapport aux autres traitements (très grande facilité d’application, un seul traitement par an, coût 5 fois moins élevé au minimum). Ce traitement a aussi l’avantage d’être très sûr au regard de la santé et de l’environnement. En effet, ce qui fait la dangerosité ou pas d’un produit chimique de synthèse ou même d’un produit naturel repose sur ses conditions d’application. Le Revive est appliqué selon une technique qui constitue une nouveauté radicale en matière de traitement phytosanitaire : le produit est injecté dans le palmier et y reste confiné ce qui élimine tout risque de contact avec l’extérieur. Si la ville de Nice et d’autres sont préoccupés par les risques sur la santé ou sur l’environnement que, selon eux, poserait ce traitement, c’est essentiellement  parce qu’ils n’ont pas saisi les implications de cette technique  novatrice,  autorisée pour la première fois en France, en raison précisément de la sécurité qu’elle offre pour des traitements en zone urbaine. Quant au risque éventuel sur les insectes pollinisateurs, l’ANSES a évalué qu’il n’était à prendre en compte que chez les palmiers possédant des organes nectarifères. Or les Phoenix canariensis en sont dépourvus.  


Je termine en invitant la ville de Nice à venir débattre loyalement et dans l’intérêt général de cette question  et de la stratégie que nous proposons pour sauver les fabuleux palmiers niçois encore indemnes ou récupérables lors de la réunion que le CMSP organise à Antibes le 31 janvier 2018. Au cours de cette réunion seront présentées à toutes les villes désireuses de sauver leurs palmiers les résultats sur la faisabilité et l’efficacité de cette stratégie obtenus sur le territoire de la CAVEM* ainsi qu’à Vence et dans plusieurs municipalités de la plateforme Palmiers06.

* La démonstration de la faisabilité d'une lutte collective sur le territoire de la CAVEM :

Point de situation au 31 décembre 2017 présenté lors de la réunion qui s'est tenue à Antibes le 31 janvier " Lutte collective: seule stratégie pour sauver les palmiers"

- 2400 propriétaires inscrits pour faire traiter leurs palmiers dans le cadre d'ARECAP

- plus de 4600 palmiers traités en 2017

- sur 2700 palmiers référencés, suivis par ARECAP et traités depuis 2016, le taux d'échecs est inférieur à 1,5%